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HTP explore ! chapitre 2 : des écologies populaires / Jardiner, c’est résister…

Dimanche 3 octobre, le collectif Horizome organisait avec la Cie Théâtre-Forum Arc En Ciel, une agora publique autour des initiatives jardinières de Hautepierre, dans le cadre des Journées de l’architecture 2021. HTP radio était présent pour garder trace de ce moment de partage, de respect et de renforcement entre jardiniers, jardinières, élu et technicienne de la collectivité.

À l’écoute, le chapitre 2 autour des pratiques d’écologie populaire :

« Jardiner au pied de son immeuble », Camille Landru

> Pourquoi « jardiner, c’est résister » ?

« Jardiner modifie notre rapport au temps, on se trouve au plus proche des saisons qui rythment la vie de la nature.  » On est là, dans une vision ou rien n’est programmé, on change s’il faut changer. Jardiner c’est accompagner le temps, c’est ne pas s’y heurter. « (entretien de Gilles Clément) 

Comme l’a ainsi montré la sociologue Laurence Granchamp après deux années passées à nos côtés, les jardins de Hautepierre sont des lieux de vie à ciel ouvert et accessible à tous les habitants, de ce fait ils offrent la possibilité de s’investir au sein d’un groupe tout en devenant acteur de sa propre consommation alimentaire.

C’est aussi de cette manière qu’ils permettent de transformer l’espace public résidentiel en terrain fertile, que ce soit concrètement au travers des plantations ou philosophiquement, en tant qu’inspiration d’une société plus juste et plus équitable, prenant ainsi en considération les pouvoirs d’action dans un quartier populaire…

Néanmoins, il est utile de rappeler ici que Hautepierre en tant que « Quartier Prioritaire de la Ville » (QPV), dénominatif institutionnalisé, est également depuis 2021, ce que l’État nomme « Quartier de Reconquête Républicaine » (QRR), où usages sécuritaires et contrôle du quartier vont de pair avec rénovation urbaine et participation habitante. La vie des jardins de Hautepierre en est un exemple concret. Comme ont pu le montrer Vincent Lebrou, chercheur en sciences politiques et Romane Joly, doctorante en sociologie dans le cadre d’une enquête ethnographique menée à Hautepierre entre 2016 et 2019 qui :

« met en lumière le caractère disciplinaire conféré aux jardins partagés lorsqu’ils se rattachent à la politique de la ville et s’articulent à un projet de rénovation urbaine. Notre article montre ainsi que ces espaces participent […] au gouvernement des conduites des habitants en œuvrant sur trois niveaux principaux.

-Spatial d’abord, lorsque la végétalisation et l’ordonnancement du quartier sont mis au service de la tranquillité publique.

-Ensuite, en dédiant certains espaces au jardinage, il s’agit de définir des comportements qui y sont autorisés et de reléguer les populations jugées « déviantes » qui ne s’y conformeraient pas.

-Enfin, l’exhortation municipale, sous peine de sanction, à formaliser l’action collective des jardiniers, ici en se constituant en association, participe à imposer des comportements dont la dissonance avec les ressources dont disposent certains habitants menace d’exclusion les plus démunis et les moins acquis au projet. »

Pour aller plus loin et lire leur analyse : Romane Joly et Vincent Lebrou, « Des jardins pour maintenir l’ordre ? Enquête ethnographique dans un quartier populaire strasbourgeois », Carnets de géographes [En ligne], 15 | 2021, mis en ligne le 30 avril 2021, consulté le 30 novembre 2021. URL : http://journals.openedition.org/cdg/7610

HTP explore ! chapitre 1 : La portée politique du jardinage / Jardiner, c’est résister…

Dimanche 3 octobre, le collectif Horizome organisait avec la Cie Théâtre-Forum Arc En Ciel, une agora publique autour des initiatives jardinières de Hautepierre, dans le cadre des Journées de l’architecture 2021. HTP radio était présent pour garder trace de ce moment de partage, de respect et de renforcement entre jardiniers, jardinières, élu et technicienne de la collectivité.

« Théâtre-forum et thé à la menthe », Camille Landru

Laissez-vous transporter à la maille Catherine, au pied de l’immeuble d’Aziz et de Marie-Claire et découvrez au fil de ce premier chapitre, ce qu’on nomme « la portée politique du jardinage » :

Agora publique « Jardiner, c’est résister », Camille Landru

Merci à Aziz et à Marie-Claire pour leur accueil et pour la visite de leur jardin respectif,

Merci à Julien, Chantal, Zaïmo, Geneviève, Joséphine, Emma, Benjamin, Ali, Brahim, Laurence, François, Mehdi et Nicolas pour leur participation au débat,

Merci à Marine pour la voix off, à Camille pour les illustrations et à Pauline pour la réalisation du podcast

> C’est quoi le thé âtre à la menthe ?

À la fois repère et refuge, le thé âtre à la menthe est un dispositif artistique qui interroge la place de l’informel dans la ville. Il a été conçu par la designer Sophie Chialva et l’artiste jardinier Zaïmo.

C’est à la fois un salon de thé à ciel ouvert, une agora in situ déliant les paroles et en même temps une performance artistique retranscrite spécialement ici pour les Journées de l’architecture 2021, par le dessin et la radio…

> Pourquoi « jardiner, c’est résister » ?

«  Quand on jardine, on est dans ce que j’appelle un territoire mental d’espérances. C’est un espace-temps particulier parce qu’on est sans arrêt sur le futur. Quand on plante une graine c’est pour demain ». Le jardinier ne serait donc pas un nostalgique. Il serait plutôt affublé d’un projet riche en surprises et soumis aux imprévus.  » (entretien de Gilles Clément)

Effectivement en ce qui nous concerne, l’impact des jardins à Hautepierre permettent de renverser les regards en montrant comment les pratiques dites populaires, d’appropriation de l’espace urbain ( voir la ville vue d’en bas, travail et production de l’espace populaire, collectif Rosa Bonheur, 2019) sont avant tout de réelles expertises sur lesquelles les élu·e·s, les architectes et les concepteur·ice·s urbain·e·s doivent s’appuyer pour avancer vers une réelle transition écologique car sociale de la fabrique de la ville.

Radio comptoir ! Les dispositifs de réciprocité

Dans le cadre des Journées de l’Architecture 2020, le Syndicat potentiel a invité les collectifs Topoi et Horizome à se rencontrer pour partager leur expérience, leur personnalité et leur engagement sociétal. Après trois jours qui ont permis à tout le monde de se découvrir, un plateau radio est organisé au Syndicat Potentiel, avenue de Colmar. Voici avec ce podcast, une recomposition du débat qui mélange les temporalités et les espaces. Il y est question du droit à la ville et de l’impact politique du pouvoir d’agir citoyen :

> Qui est le collectif Topoï?

Au travers de la présentation des dispositifs de réciprocité conçus et réalisés par le collectif Topoi, Flore Grassiot et Antoine Miallon, architectes, retracent les différents projets menés en horizontalité permettant d’assumer une fabrication de la ville ouverte et appropriable par ses habitant·e·s :

Pour aller plus loin : www.topoi.site

> Et si on racontait l’Odylus…

C’est le moment de revenir sur 18 mois de recherche-action au sein d’une aile de l’ancienne clinique Sainte-Odile, où le collectif Horizome et l’association L’Étage ont pu expérimenter avec les 80 résident·e·s du lieu comment lier accompagnement social et démarche artistique au sein d’un centre d’hébergement éphémère. C’est ce que l’on nomme dans le jardon l’habitat intercalaire. À l’initiative du projet, un élu municipal Syamak Agha Babaei et un promoteur immobilier Eddy Vingataramin :

Pour aller plus loin : www.raconter-odylus.org

Un plateau radio organisé par HTP radio au Syndicat potentiel, le 8 octobre 2020.

À la régie : Grégoire Zabé, Jean-François Mugnier.

Avec les interventions de Flore Grassiot, Antoine Mialon, Nathalie Chamagne, Kevin Clementi, Rémi Buscot, Grégoire Zabé, ZaïMo, Thomas Nussbaumer, Riad Ghoul, Anna , Souad El Maisour et Pauline Desgrandchamp.

Un montage de Pauline Desgrandchamp pour HTP radio.

HTP explore ! Hautepierre, côté jardin

Dans le cadre des Journées de l’Architecture 2020, HTP Radio a organisé avec l’aide de Femmes d’Ici et d’Ailleurs et du CSC Le Galet, le premier escape game à ciel ouvert de Strasbourg, permettant d’interroger la démocratie alimentaire et le rapport aux jardins dans le quartier.

L’objectif derrière cette proposition immersive, était de permettre de revenir sur un projet de recherche participative réalisé durant les deux dernières années avec un groupe de jardinier·e·s de Hautepierre, des artistes intervenants du collectif Horizome et des chercheurs de l’Université de Strasbourg.

> L’espace public peut-il se concevoir comme un espace d’appropriation jardinière et de plantations ?

C’est l’une des question de fond du projet de recherche dénommé EXCIPIENT pour Expérimentations Citoyennes, Passeurs d’Initiatives et Engagements dans la Transition agricole et alimentaire, prétexte de l’histoire du jeu proposé.

Retour avec ce podcast, qui utilise plusieurs temporalités et différents types de sources sonores, afin de mieux partager une histoire de Hautepierre, côté jardin :

> Un escape game pour s’échapper de ses clichés…

Le 4 octobre 2020, quatre groupe de trois à quatre personnes arpentaient les mailles Brigitte, Jacqueline, Karine et Catherine, à la découverte plurisensorielle des espaces verts de Hautepierre & à la rencontre de voisin·e·s initiateurs de différents jardins. Une manière ouverte et conviviale de partager l’histoire d’un projet de recherche participative sur la question de la démocratie alimentaire, réalisé entre octobre 2018 et octobre 2020.

Avec la participation de Dalila, Ilhame, Aurélie, Pascale, Sanah, Malek, Ryan, Elsa, Saadia, Gwenaelle, Mounia, Assya, Haroun, Souad, Thomas, Léa, Mame et Abdel.

Un projet conçu et imaginé par Marie-Élodie Savary et Pauline Desgrandchamp dans le cadre de la restitution de EXCIPIENT,

Avec l’aide de Manon Kaupp, Mathilde Barbey, ZaïMo, Joséphine Hassouna, Marie-Claire Nhim et Aziz Kouhous.

Hautes Pierres, Jardin du monde. Un travail de collage-vidéo signée Mathilde Barbey, 2020

> Un retour de l’expérience par Aurélie, participante de la balade

Je m’appelle Aurélie et je suis stagiaire à Horizome sur le mois d’octobre 2020 autour de la question de la transmission par les jardins. Je suis étudiante en design, en DN-MADE (Diplôme National des Métiers d’Art et du Design) Innovation Sociale au lycée Le Corbusier à Illkirch. C’est un nouveau diplôme où je peux apprendre le design graphique et le design produit en situation. Effectivement, dans ces études, nous n’apprenons pas à faire du design commercial mais plutôt du design social.

Le concept d’escape game est au départ une activité divertissante destinée à tous les publics. Les participants sont enfermés dans une salle préparée selon un scénario spécifique. En général, ils doivent réussir à sortir en moins de 60 minutes en fouillant la salle et en résolvant des énigmes. Ici, c’était une approche un peu différente : le but n’était pas de sortir d’une salle mais des préjugés facilement associés à un quartier populaire. Durant cette balade semi-gustative, les participants, par groupes de quatre personnes, ont dû se rendre à différents endroits, à la rencontre de jardinier·e·s de Hautepierre. En tout 5 spots, 5 initiatives à découvrir pour terminer au local de Pépinière pour un ciné-débat organisé par Terre de liens Alsace.

Pendant la balade, nous autres participants, avons fait des croquis, goûté tout ce qui était proposé, sentis, écrit, dessiné, pris des photos des agencements de jardin… On a également ri, souri, fait les curieux, partagé, appris. Nous prenions plaisir à répondre aux énigmes.

J’étais dans un groupe très intéressé par le monde végétal. Mes coéquipières avaient des connaissances sur les vertus des plantes et étaient très enthousiastes de découvrir leur quartier d’une nouvelle manière. L’une est secrétaire d’un jardin partagé à Schiltigheim. Et l’autre s’occupe d’un jardin familial. Toutes deux font parties de l’association Femmes d’ici et d’ailleurs.

J’ai trouvé cette expérience très enrichissante ; à la fois par les rencontres que j’ai pu faire mais aussi par les découvertes et les dégustations nouvelles. Grâce aux rencontres et à la déambulation, j’ai pu découvrir Hautepierre.

On a goûté des recettes à base de plantes comme la capucine, les orties. Ce sont des plantes qu’on ne sait pas toujours utiliser par manque de connaissance sur les plantes sauvages. Nous avons aussi pu découvrir également certaines vertus des plantes contre les maladies, les douleurs mais aussi pour la santé en général.

Ce qui m’a le plus marqué, c’est le partage et le fait qu’au fur et à mesure de la balade, les liens de confiance se créent, on devient proche très rapidement parce qu’on partage une expérience sensorielle et émotionnelle ensemble. Les différents endroits de rendez-vous étaient finalement des prétextes pour se rencontrer : les personnes restaient longtemps aux points de rencontre et on s’est vite rendu compte de la richesse humaine du moment. Je me suis alors rendu compte de comment par une démarche de design en situation, il est possible de vivre une expérience collective forte.

carnet de l’escape game, page 22 et 23
carnet de l’escape game, page 18 et 19

> EXpérimentations CItoyennes, Passeurs d’Initiatives et ENgagements  dans la Transition agricole et alimentaire  : Une recherche-action participative à Hautepierre

Quand le « faire soi-même » s’invite au pied des immeubles ( jardins partagés en cœur de maille + jardins en pied d’immeuble et/ou sur les balcons, arbres fruitiers qui poussent un peu à droite et à gauche dans l’espace public, jardins pédagogiques ou ruches sur le toit d’un immeuble, etc) et que l’on tente de documenter en commun, artistes, chercheurs et jardiniers sur la question de l’alimentation à Hautepierre, cela pose différentes questions intéressantes sur nos usages de la ville de demain, plus écologique, sociale et démocratique. Entre octobre 2018 et octobre 2020, différents temps forts ont pu être organisés permettant d’investiguer les liens entre des initiatives agricoles et alimentaires à Hautepierre.

L’exercice de la démocratie, au-delà d’une approche en termes de justice sociale et alimentaire, met l’accent sur la possibilité de choisir, d’agir, d’avoir voix au chapitre dans la définition des systèmes alimentaires. Simultanément, le choix même d’en appeler à une démocratisation des systèmes alimentaires souligne combien une grande part des industries agroalimentaires tend à s’abstraire de tout contrôle citoyen, par l’opacité des réseaux de circulation, l’absence de transparence sur les produits utilisés ou sur l’équité quant à la répartition de la valeur ajoutée. Face à ce constat, les initiatives de démocratie alimentaire cherchent à agir sur deux volets principaux : la « reconnexion » entre producteurs et consommateurs (la disjonction voire opposition des intérêts des uns et des autres constituerait un pilier du capitalisme), et la « relocalisation » ou autrement dit, la mise en  oeuvre  d’initiatives à l’échelle locale et/ou à taille humaine.

Les différents moments de rencontre entre jardinier·e·s, artistes et chercheur·e·s ont pu permettre effectivement de mieux conscientiser comment et pourquoi des initiatives écologiques et sociales perdurent dans le quartier. En quoi le fait de planter devient une alternative à la consommation du grand Auchan? Pourquoi le fait d’apprendre à fabriquer son propre miel le rend meilleur aux yeux des goûteurs? Comment il est important de pouvoir se transmettre entre passionné·e·s des astuces de plantation culturelles et intergénérationnelles?

Pour aller plus loin sur la démarche de la recherche participative, rdv sur www.excipient.archipels.org

Coordination scientifique du projet EXCIPIENT : Laurence Grandchamp, laboratoire DYNAME

> Sources utilisées :

Montage : Pauline Desgrandchamp et Marie-Élodie Savary

Avec les interventions de ZaïMo, Laurine Sandoval, Marie-Claire Nimh, Aziz Kouhous, Manon Kaupp, Geneviève Manka, Vincent Lebrou, Béatrice Pipart et Pauline Desgrandchamp.

Et l’utilisation de :

-Hautepierre, cité jardin, archive INA, 1976.

Évasions, création sonore, juin 2020, Marie-Élodie Savary

Visite des jardins, ambiance sonore, septembre 2019, Béatrice Pipart, ZaïMo, Laurine Sandoval, Marie-Clair Nimh et Pauline Desgrandchamp.

Balade entre jardinier·e·s au pied des immeubles, ambiance sonore, juillet 2020, Marie-Élodie Savary et Vincent Lebrou

Entretien avec Aziz Kouhous, mars 2019, Pauline Desgrandchamp et Vincent Lebrou

Au jardin du coin, maille Catherine, ambiance sonore, mai 2018, Pauline Desgrandchamp

Photographies d’Aurélie Niot, Pauline Desgrandchamp et Manon Kaupp.